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Portrait d’Eric Berseth par Emily Lugon Moulin

May 22nd, 2013  |  Emily Lugon Moulin

Eric Berseth : « On était sur une ligne de front avec des conditions climatiques et sécuritaires extrêmes (…) J’ai perdu neuf kilos en quatre mois »

Tour à tour cancre, athlète, major de promotion, humanitaire et aujourd’hui chef d’entreprise. Le parcours d’Eric Berseth se joue des conventions. Portrait d’un humaniste pour qui la vie est avant tout une rencontre avec les autres.

Les inondations, tremblements de terre, catastrophes naturelles et humaines, Eric Berseth en a vécu en abondance ces dernières années. Si bien que l’on pourrait croire que ce jeune homme de trente quatre ans a déjà vécu    plusieurs vies. Mais si aujourd’hui, Eric continue de parcourir le monde, c’est pour les besoins de la société qu’il a créé avec trois associés en 2011 : « Philanthropy Advisors», qui propose un service sur mesure pour accompagner les grands donateurs, privés et institutionnels, dans la réalisation de projets philanthropiques.

Le contexte : « J’ai grandi dans un cadre privilégié »

Eric Berseth accepte immédiatement de m’accorder une interview. Généreux est un adjectif qui lui va bien. On passera ensemble plus de trois heures malgré son agenda chargé. Mais ce qui me surprend chez lui c’est un certain détachement, dans son ton et son récit sur ses années de terrain. « Quand tu fais de l’humanitaire, il ne faut pas le faire dans le but de changer le monde. J’avais des relations très humaines avec chaque personne que je rencontrais, pour qui individuellement c’était possible de faire la différence ». Il pose un regard pragmatique sur ce qu’il a vécu. Le contact avec les autres -­‐ les humains avec un grand H, comme il le dit – a toujours été au centre de son attention et cela depuis son enfance : « J’ai grandi dans un cadre privilégié. Pourquoi ne pas donner de mon temps et de mes compétences pour les gens qui n’ont pas eu la même chance que moi ?».

Eric vient d’une famille heureuse et évolue depuis son plus jeune âge dans un cocon moelleux où les gros problèmes ne sont pas courants. Troisième d’une fratrie de 4 enfants qui s’entendent à merveille, il tient son physique longiligne et ses yeux bleus d’une mère suédoise. De son père suisse, c’est du goût du sport et de la compétition qu’il a hérité. Sa sœur Elsa me confie,  amusée.

« Eric est un grand sensible doublé d’un doux rêveur. Petit, il arrêtait la circulation pour faire passer une file de fourmis – il a toujours eu cela en lui ». Une vocation, une affiliation, un hasard ? C’est un peu tout cela qui a poussé cet homme à partir dans la coopération internationale. Mais un événement ouvrira la voie.

Le déclic : « Mitch » l’ouragan

En 1998, après avoir décroché son bac, Eric s’envole pour le Costa Rica pour apprendre l’espagnol, travailler avec des enfants et faire du surf. La même année, l’ouragan « Mitch » plonge l’Amérique centrale dans le chaos et Eric se trouve, malgré lui, confronté à une situation d’urgence. « J’habitais dans le quartier « Pied Dans L’eau », lorsqu’il y a eu les premières inondations, on a été les premiers affectés. J’ai vécu « Mitch » depuis l’intérieur, avec la population locale, en situation d’urgence ». C’est fort de cette nouvelle expérience qu’il rentre en Suisse et décide de s’inscrire à l’Institut HEID (Haute Etudes Internationales et du Développement) laissant tomber les études de droit pour lesquels il se prédestinait.

Le métier : « Tu peux rien lâcher quand tu es sur le terrain »

Sa première mission, il l’a faite avec le pool d’urgence de Médecins Sans Frontières en République Démocratique du Congo, dans un camp de déplacés de 53’000 personnes. Premier choc culturel dans un contexte de guerre civile acharnée: « Tu vis avec cela en tête et tu n’a pas d’autres choix que de l’accepter. En mission, tu es tellement sollicité que tu n’y réfléchis pas. Tu ne peux rien lâcher quand t’es sur le terrain. Tu y penses quand tu reviens et que tu décompresses ».

S’en suivra l’Ouganda, le Tchad, le Soudan (Darfour), le Mozambique, l’Afghanistan, Haïti, et bien d’autres. Sa mission la plus difficile, il l’a vivra au Tchad sur un projet de chirurgie de guerre, « On était sur une ligne de front avec des conditions climatiques et sécuritaires extrêmes – on était opérationnel H24 (…) j’ai perdu neuf kilos en quatre mois ».

Eric se fait discret dès qu’il s’agit de sa vie privée. Il évoque deux raisons qui l’ont poussé à rentrer en Suisse. L’envie de trouver un meilleur équilibre entre sa vie privée et sa vie professionnelle et l’autre, plus pragmatique «si tu fais du terrain plus d’un certain nombre d’années, c’est très compliqué de se réinsérer sur le marché du travail plus classique »

Mentors et futur

Plusieurs personnes ont joué un rôle dans l’engagement d’Eric. Son grand-­‐père médecin, qu’il a beaucoup idéalisé et un collègue qui a joué un rôle de mentor, notamment pour son coté « anti-­héro »: « c’est la première personne que j’ai rencontré qui faisait de l’humanitaire de façon nonchalante. Au final, il en faisait quinze tonnes de  plus  que  les  autres ».  C’est  avec  cette  mentalité et sa nouvelle casquette d’entrepreneur qu’Eric veut continuer d’œuvrer dans l’humanitaire, en aidant les grands donateurs à  s’engager  dans  leurs  activités  philanthropiques afin d’en garantir un impact maximum pour les bénéficiaires.

Original article on Emily Lugon Moulin


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