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Comment conférer aux dons une efficacité optimisée

August 22nd, 2014  |  Agefi Magazine Par Eric BERSETH et Vincent MUDRY

L’externalisation du conseil en philanthropie profite aux banques et à leurs clients. Mais tout autant aux bénéficiaires finaux de l’aide.

Le conseil en philanthropie, proposé aux grandes fortunes dans les banques, est un service relativement nouveau. En Europe continentale, ce n’est que depuis une grosse décennie que l’activité, au sein de départements dédiés et avec des compétences spécialisées, est proposée en sus des activités classiques de gestion de patrimoine. On ne peut d’ailleurs que reconnaitre le caractère courageux et innovant des banques ayant structuré une offre en ce sens, le plus souvent sans coûts supporté par le client, permettant ainsi d’améliorer le financement de causes d’intérêt public. Dans un premier temps, ce sont des activités proches du coeur de métier bancaire qui ont été développées, avec des services fiscaux, financiers et légaux principalement. Pour mieux coller aux désidératas des clients et à l’évolution globale de la philanthropie, des compétences opérationnelles ont ensuite été ajoutées, requérant le grossissement des équipes et la recherche de profils intégrant aussi bien l’expérience bancaire que la connaissance plus fine du milieu associatif, de l’humanitaire et du développement, afin d’orienter les clients vers des investissements philanthropiques mieux calibrés, plus pertinents et, in fine, plus utiles aux bénéficiaires de l’aide.
Cette inflation de la fonction, sa diversification et sa complexification, nécessitant des équipes plus complémentaires et plus larges, pose la question des limites à l’internalisation de ce service pour le secteur bancaire suisse.

Spécifique. Les raisons à cette internalisation sont nombreuses et aisément compréhensibles car une grosse part du service philanthropique n’est qu’un aspect spécifique à la gestion de patrimoine et nécessite une ingénierie similaire à celle développée pour produire des intérêts financiers. L’un des enjeux de la banque étant la satisfaction et la fidélisation du client, le conseil en philanthropie fait ainsi partie de la large palette de services annexes et «petits plus», offerte aux clients pour construire avec eux une relation personnelle et durable. C’est particulièrement le cas dans le cadre d’activités philanthropiques, souvent chargées d’émotions. Concomitamment, la gestion de la philanthropie des clients, permet aux banques de garder en interne la gestion des sommes afférentes à cette activité tout en gardant une certaine confidentialité, minimisant ainsi les risques réputationnels de la gestion patrimoniale du client.
Si l’approche interne fonctionne parfaitement et offre d’excellents services aux clients, elle met les banques face à un certain nombre de limites, de contraintes et de risques. En effet, au-delà de l’efficacité, de la relation approfondie avec le client et de la parfaite maitrise des mécanismes fiscaux, légaux et financiers en jeux, ce service apparaît totalement pertinent pour une simple mise à disposition de fonds pour des causes d’intérêt public. Il atteint néanmoins ses limites face aux évolutions récentes du secteur et les risques y afférant. On peut tout d’abord noter que ce service a un certain coût, qui peut fortement augmenter en fonction des volontés du client et de la complexité de ses desiderata philanthropiques. De plus, lorsqu’il porte sur le contenu opérationnel de la philanthropie, domaine très éloigné du coeur de métier bancaire, il requiert des compétences et connaissances propres à l’univers de l’aide. La tendance actuelle étant à une demande pour plus de proximité avec les bénéficiaires, ainsi qu’une volonté de compréhension, de garantie, de contrôle, de suivi, d’évaluation et de mesure d’impact de ce qui est financé, les attentes en matière de conseil philanthropique s’accroissent, requérant temps, technicité et spécialisation croissante.

Les attentes en matière de conseil philanthropique
augmentent. Requérant une spécialisation toujours plus fine.

Investissement. Alors que la philanthropie traditionnelle s’attachait plus à l’acte de don qu’à la poursuite d’un objectif particulier et précis, de plus en plus de donateurs veulent aujourd’hui s’investir personnellement, choisir leurs projets ou le co-construire avec une ONG, plutôt que simplement émettre un chèque. Parallèlement, la rapidité de circulation d’information et la transparence demandée au secteur de l’aide, exposent les philanthropes et leurs conseillers à la révélation de dysfonctionnements majeurs sur ce qu’ils financent, tels que l’inadéquation des projets avec les objectifs recherchés et/ou leurs contextes, les malversations, corruption ou autres problématiques pouvant affecter le succès des projets et donc, de fait, l’impact sur les bénéficiaires. Ces maux sont malheureusement encore trop présents dans de nombreux projets peu ou pas contrôlés indépendamment et exposent les banques comme leurs clients à des risques d’image et à des risques de dégradation de leur relation. De même, l’aide étant de plus en plus technique et complexe, faire les bons choix de financements requiert un spectre de compétences techniques de plus en plus large et spécialisé.

Ainsi, alors qu’il faudrait aller plus près des causes financées, du terrain, des projets et des bénéficiaires, les banques sont face à un paradoxe car elle ne sont pas nécessairement armées ni en compétence, ni en temps. Elles ne pourront à terme pas nécessairement absorber les coûts grandissants ou faire face aux problèmes plus concrets d’assurance ou de process.
C’est donc pour répondre à ces besoins spécifiques, qu’en parallèle des services développés par les banques – avec plusieurs décennies de retard sur le monde anglo-saxon, notamment les états-Unis –, le conseil indépendant, non rattaché à une structure de gestion de patrimoine, s’est développé. En Suisse, WISE a notamment ouvert la voie avec une offre externe de services philanthropiques. Aujourd’hui, le secteur, encore jeune, d’abord représenté par des conseillers en free-lance, s’est étoffé d’autres acteurs tels Social Investors ou Philanthropy Advisors, proposant un service indépendant attaché à la qualité et au suivi des projets soutenus.
Leur offre, plus structurée et complète, permet aux philanthropes de trouver des solutions sur mesure pour plus d’impact, plus de proximité et plus de mesure de ce qu’ils financent réellement. Comme le résume Werner Blatter de Social Investors, «le philanthrope moderne n’a le plus souvent pas le temps, et exige donc de ses conseillers expertise, expérience, professionnalisme et indépendance.» Grâce à leur réseau et leurs compétences issues en partie de l’humanitaire et du développement professionnel, ces entreprises répondent aux exigences tant techniques que qualitatives des philanthropes modernes en améliorant significativement l’impact pour les bénéficiaires de l’aide.

Légitime. Alors que ces différents acteurs pourraient sembler concurrents et faire doublon, les deux services, interne aux banques et externe, sont tous deux légitimes et performants car spécialisés sur deux extrémités du spectre de la philanthropie. C’est plutôt leurs forces et leur complémentarité qui doivent être regardées que ce qui pourrait les mettre en concurrence. Au-delà de l’expertise essentielle légale et financière, gratuitement offerte aux philanthropes par les banques, travailler avec les entreprises de conseil indépendantes aux services ad hoc, permet d’avoir une approche opérationnelle cohérente et adaptée, intégrée dans son contexte, répondant aux besoins des philanthropes comme des bénéficiaires; la possibilité d’accompagnement des projets choisis par le philanthrope, leur mesure et évaluation accroissant d’autant leur impact.

Faire les bons choix de
financements requiert un spectre
de compétences techniques de
plus en plus large et spécialisé.

Ainsi c’est bien pour répondre aux dilemmes et limites du conseil en philanthropie bancaire que le secteur s’est étoffé; plutôt que d’internaliser ou d’externaliser complètement ce service, l’offre du marché indique la réponse avec un service interne d’excellence, cohérant avec le métier bancaire, en en reconnaissant les limites, et la possibilité offerte d’externaliser la partie opérationnelle auprès des conseillers spécialisées qui peuvent accompagner les clients jusqu’à la mesure de l’impact sur le terrain.

Cette approche pourrait être qualifié de «win win» plus car elle bénéficie aux banques et à la relation client, aux clients mais tout autant aux bénéficiaires finaux de l’aide grâce à une efficacité et un impact plus important conférés aux dons.

Par Eric BERSETH et Vincent MUDRY

Original article on Agefi Magazine Par Eric BERSETH et Vincent MUDRY


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